Le zéro déchet à Paris avec Emmaüs Défi

S’engager dans la démarche zéro déchet zéro gaspillage, ça commence avec des initiatives locales. Dans cette série « Le zéro déchet à Paris », on vous fait découvrir des idées, des projets et des initiatives qui s’inscrivent dans une économie sociale et solidaire pour la réduction des déchets sur le territoire de Paris et Île-de-France. Découvrez les personnes qui à côté de chez vous se mobilisent et font bouger les choses !


Qui ? Emmaüs Défi Riquet
Quoi ? Le plus grand magasin de seconde main de Paris qui regroupe vêtements vintage, meubles, électroménager et bibelots en tout genre
? Au 40 Rue Riquet, dans le 19ème arrondissement de Paris : tout près du Territoire zéro déchet du Bassin de la Villette


Le marché des mille et une merveilles

Dans cet ancien marché couvert du 19ème, on a l’impression de se promener dans une fourmilière aux trésors. Toutes sortes d’objets, aussi uniques les uns que les autres, trouvent leur place dans les allées soigneusement rangées du magasin. Et pour cause, de la réception des dons à la mise en rayon, les vêtements comme les bibelots vont passer de main en main pour être scrutés, étiquetés et rangés.

Emmaüs, enseigne bien connue de la seconde main solidaire, abrite plus de métiers de l’ombre que ce qu’on pourrait penser. Avec plus de 1000m2 d’espace de vente et 3000m2 destinés au traitement et à la gestion des dons en tous genres, la boutique Emmaüs rue Riquet décroche haut la main le titre de plus grand marché couvert de Paris. Si le site garde un fort lien avec d’autres éco-organismes pour certaines tâches, il reste le centre névralgique du tri des dons. Récupération et inspection des dons, réparation, test de l’électroménager, menuiserie, vente, tout y passe !

Les salarié.e.s montent ainsi en compétences dans leur domaine de prédilection et ont un emploi du temps aménagé pour les accompagner dans leurs projets personnels, avant de se réinsérer dans le parcours classique du marché de l’emploi. L’objectif est de rendre autonomes des salarié.e.s appartenant à une population vulnérable (parcours à la rue, migrant.e.s…) en leur offrant la possibilité d’évoluer à leur rythme dans une structure adaptée à leur besoins.

Chaque année, ce sont plus de 300 personnes qui sont employées et accompagnées par Emmaüs Défi. Toutes les mains s’activent pour faire tourner le grand circuit de la seconde main. Et ce n’est pas de tout repos ! “Dans trois semaines, les objets en boutique auront complètement changé” : entre les arrivages constants de dons, qu’ils viennent de particuliers ou d’entreprises, et les besoins de la boutique, le rythme est soutenu et la plupart des secteurs travaillent en flux tendu.

Tirer son épingle du jeu de la seconde main

Pourtant, il reste un coin du site Riquet préservé de la cadence de la boutique. Le son des machines à coudre nous guide vers le fond du grand hall d’Emmaüs Défi.

Ce petit atelier, loin du tumulte du tri du sous-sol, est le dernier rempart entre les vêtements et la poubelle. En effet, avec près de 5 tonnes de dons reçues chaque jour, il est difficile de tout récupérer. Le textile est le seul pôle à ne pas travailler en flux tendu et a dû se diversifier pour s’adapter aux évolutions du marché. Depuis 2022, la loi AGEC interdit la destruction des textiles invendus afin de réduire leur impact, ce qui a poussé les entreprises du textile à s’intéresser aux dons, moyennant une réduction fiscale.

La marchandisation de la seconde main, avec le développement de plateformes comme Vinted, mais aussi l’engouement autour de ce marché, a aussi fait diminuer la qualité des dons. La surreprésentation de la fast fashion dans les marques données par les particuliers entraîne son lot de désagréments : des vêtements plus sujets aux défauts, moins solides, répondant à des micro-trends… Ces effets combinés constituent de nouveaux challenges pour des structures comme Emmaüs, qui doivent désormais trouver un moyen de revaloriser leurs produits. L’exemple le plus parlant concerne les articles communs délaissés par l’achat en seconde main : les fourrures synthétiques et les draps par exemple trouvaient difficilement preneur.euse.s. et finissaient en recyclerie comme déchets finaux. C’est en voyant ce flux de matière inexploité que Jeanne a décidé de relancer l’atelier de couture en novembre.

Des produits simples dans de belles matières

Autrefois principalement centré sur l’upcycling, l’atelier se diversifie pour répondre à des commandes et valoriser la matière délaissée. Aussi appelé “l’atelier des re-créateurs” pour les intimes, il faut traverser la forêt de tissu pour voir la magie opérer. Les fourrures trop flashy se transforment en bouillottes, les chutes de tissu en macramé et les draps en lin tachés à certains endroits… en sacs à pain !

Des sacs à pain que Zero Waste Paris connaît bien puisque, dans le cadre d’un partenariat entre Emmaüs Défi et Zero Waste Paris, l’atelier a conçu pour nous des sacs à pain très soignés pour en faire de jolis objets pour la cuisine. C’est le premier patron créé par Jabir, qui estime que l’étape la plus longue a été l’assemblage. Avec des vieux draps composés à 100% de lin, Jeanne et son équipe ont imaginé le sac à partir d’un constat : les draps sont difficilement vendables à cause d’imperfections du quotidien, mais il reste beaucoup de matière de qualité qu’il est possible d’exploiter. En déplaçant des tas de tissus colorés, Jeanne nous explique qu’il s’agit d’ “une autre manière de penser la conception, parce qu’on part de l’existant”.

Boutonnière, ourlet, surfilage, toutes les techniques de couture sont pratiquées et perfectionnées. Niclette, une des couturières de l’atelier, à appris le métier ici, dans le cocon de fil et d’aiguille de la boutique Riquet. Auparavant dans la vente, comme Jabir, elle apprécie le calme et la minutie de l’atelier de couture. En plus de monter en compétences professionnellement, travailler dans l’atelier permet aussi à l’équipe de pratiquer le français en adoptant le jargon des tissus. Pour Jeanne, c’est aussi “l’occasion de réaliser leur potentiel”.

Une occasion saisie puisque l’équipe a récemment pu montrer ses créations lors d’un défilé au centre commercial des Halles. Réalisées à partir de dons improbables (écharpe de foot ou encore combinaison de plongée), ces pièces uniques font la fierté de l’atelier. La robe en macramé, en particulier, a marqué Jabir qui la classe comme une de ses œuvres favorites. Voir son travail porté et apprécié par le public reste la plus belle récompense pour les recréateur.ice.s. Un travail que vous pourrez retrouver dans la boutique Emmaüs de la rue Riquet !

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